Giacobbe Giusti, Canaan (région)
Canaanite sarcophagi (Israel Museum)
Giacobbe Giusti, Canaan (région)
Canaan/kanaɑ̃/(phénicien : ou 𐤊𐤍𐤏𐤍, KNˁN (Kanaʿn) ; hébreu : כנעןKənáʿan ; arabe : كنعانKanʿān) désigne une région du Proche-Orient ancien située le long de la rive orientale de la mer Méditerranée. Cette région correspond plus ou moins aujourd’hui aux territoires réunissant l’État d’Israël, les Territoires palestiniens, l’ouest de la Jordanie, le Liban et l’ouest de la Syrie. On appelle Cananéens les habitants de ce territoire à l’âge du bronze, parfois appelé pour cette région « période cananéenne ».
Dans le récit biblique, Canaan désigne la terre promise aux Hébreux, par Dieu (Yahvé) à Abraham. Elle désigne la région comprise entre la mer Méditerranée et le Jourdain, avant sa conquête par Josué et les tribus d’Israël sorties d’Égypte. Le terme proviendrait du nom de Canaan, petit-fils de Noé.
Étymologie
L’étymologie de Canaan est discutée. Le mot est généralement considéré comme formé sur une racine sémitique, même si une origine hourrite a aussi pu être proposée. Dans les alphabets nord-ouest sémitiques (hébreu, ougaritique, phénicien), Canaan est écrit knʕn. Dans le texte massorétique de la Bible, il est vocalisé כְּנַעַן(kĕnaʕan). En cunéiformeakkadien, il peut être écrit ki-na-aḫ-nu(m) (Mari, Byblos, Tyr), māt ki-na-ḫi (Assyrie, Ougarit) ou māt ki-in-na-aḫ-ḫi(Égypte, Mitanni, Hattusa, Babylone). On trouve aussi la forme ki-in-a-nim (Alalakh) où la consonne pharyngale /ḫ/ est absente. Le terme dérive probablement de la racine sémitique knʕqui signifie courber, soumettre. Appliqué au soleil, le terme désignerait l’« occident », le « pays du soleil couchant ». L’étymologie hourrite relie Canaan à kinaḫḫu qui désigne un tissu bleu dans les textes cunéiformes de Nuzi, mais cette étymologie est moins probable. Dans la Bible hébraïque, Canaan prend parfois la signification de « marchand » à cause de la réputation de marchands des Phéniciens1,2.
Tradition biblique
Selon la Bible hébraïque, ce territoire est appelé ainsi du nom du personnage de Cana’an, fils de Cham, second fils de Noé. La Bible fait ensuite mention de sept ethnies qui peuplent le Pays de Canaan et qui sont connues sous le nom générique de Cananéens : ce sont les Hittites, les Girgashites, les Amorrites, les Cananéens, les Perizzites, les Hivites et les Jébuséens.
Dans le livre de Josué, le pays de Canaan fait l’objet de la conquête et du partage du pays par les Hébreux (vers le xiie siècle av. J.-C.).
Histoire
Âge du Bronze
Le nom de Canaan est ancien et semble être apparu au IIIe millénaire av. J.-C.. On a retrouvé des mentions de son nom sur des tablettes trouvées dans les ruines de Mari, où elle apparaît en tant qu’entité politique distincte. Il s’agissait sans doute d’une terre d’une certaine diversité ethnique. Mais dans un contexte ethnique, il semble que les Canaanéens, voisins et proches parents des Amorites, correspondent exactement aux Phéniciens.
Sous la XVIIIe dynastie égyptienne, les Égyptiens attaquent à plusieurs reprises le Pays de Canaan, notamment sous Amenhotep Ier, sous Thoutmôsis Ier, où l’armée égyptienne atteint l’Euphrate au nord, sous Thoutmôsis II et sous Thoutmôsis III où a lieu la bataille de Megiddo. Les Cananéens, regroupés sous les ordres du gouverneur de la ville de Qadesh nommé Ali El-Assi, et les Égyptiens, sous les ordres du pharaon Thoutmôsis III, assiègent la ville de Megiddo pendant sept mois et obligent les Cananéens à se rendre.
Âge du Fer
À partir du moment où Israël émerge, le terme Canaan commence à laisser place à trois nouveaux termes selon les régions. La Phéniciedésigna le littoral nord, la Philistie désigna le littoral sud et le Royaume d’Israël les terres intérieures.
Pour certains[Qui ?], Cananéen peut en fait être considéré comme un synonyme de Phénicien, car les deux peuples parlaient la même langue et avaient les mêmes dieux. Ils estiment que les Israélites n’ont pas fait disparaître les Cananéens mais se seraient mélangés à eux et auraient adopté certaines de leurs coutumes. Certains passages bibliques et le fait que l’hébreu biblique soit linguistiquement très proche du phénicien le prouveraient. Selon la Bible, le roi Hiram de Tyr, dont le sarcophage a été conservé, aurait été ami avec Salomon, roi d’Israël.
Les découvertes archéologiques menées par Israël Finkelstein dans les années 1990 tendent à prouver que le pays de Canaan ne fut pas en fait conquis militairement, mais que l’apparition des premières communautés israélites sur les hautes terres intérieures, vers 1200 av. J.-C., est le résultat d’une transformation interne de la société cananéenne. Les premiers Israélites seraient donc de souche cananéenne (probablement des groupes dissidents, réfractaires à la domination égyptienne qui sévissait alors[réf. nécessaire]), ayant quitté les cités-États des hautes terres et leurs réglementations contraignantes pour s’établir plus à l’ouest[pas clair].
Religion
La religion cananéenne reconnaissait un dieu primordial3 : El, père de l’humanité et de toute créature. Des tablettes découvertes dans la bibliothèque royale d’Ebla (site archéologique de Tell Mardikh en Syrie), datant du xxive siècle av. J.-C., mentionne ce dieu El en tête d’une liste de divers dieux, comme dieu ancêtre des autres dieux et père de tous les dieux. El était l’époux de la déesse Asherah (ref. tablettes d’Ugarit). Il est le père de nombreux dieux dont les plus importants sont Haddad, Yamet Mot.
Langue cananéenne
Le cananéen désigne aussi un groupe de langues phénico-cananéennes du nord-ouest. Ce sont les dialectes suivants : le phénicien(incluant la langue punique de Carthage) ainsi que l’araméen.
Cananéisme
Le terme de Cananéen sera réemployé par un groupe sioniste nationaliste de droite marginal, actif des années 1930 aux années 1970 et qui entendait opérer une rupture néo-païenne avec le judaïsme. On parle de « cananéisme ».
Notes et références
- (en) Michael C. Astour, « The Origin of the Terms « Canaan, » « Phoenician, » and « Purple » », Journal of Near Eastern Studies, University of Chicago Press, vol. 24, no 4, , p. 346-350
- (en) Philip C. Schmitz, « Canaan (place) », dans David Noel Freedman (dir.), Anchor Bible Dictionary, Doubleday,
- Judges and Ruth, par Victor Harold Matthews, Cambridge University Press (2004)
Bibliographie
- (en) Eric M. Meyers (dir.), Oxford Encyclopaedia of Archaeology in the Near East, 5 vol., Oxford et New York, Oxford University Press, (ISBN 0-19-506512-3)
- (en) Jonathan N. Tubb, Canaanites, Londres, British Museum Press,
- (en) Niels P. Lemche, The Canaanites and their land : The tradition of the Canaanites, Sheffield, JSOT Press,
- (en) Nadav Na’aman, Canaan in the Second Millennium B.C.E. : Collected Essays Volume 2, Winona Lake, Eisenbrauns,
- (en) Ann E. Killibrew, Biblical People and Ethnicity : An Archaeological Study of Egyptians, Canaanites, Philistines, and Early Israel, 1300-1110 B.C.E., Atlanta, Society of Biblical Literature,
- (en) Lester L. Grabbe, Ancient Israel : What Do We Know and How Do We Know It?, Londres et New York, T&T Clark, (ISBN 978-0-567-03254-6)
Voir aussi
Article connexe
Liens externes
- André Lemaire, « Les Cananéens, le Levant et la mer » Clio [archive]
- Ju.B.Tsirkin (Novgorod University)- Canaan. Phenicia, Sidon – Aula Orientalis, 19 (2001) p.271-179 [archive]